Où Mucius s’intéresse aux tactiques employées par les adversaires de vos héros, pour rendre vos combats plus vivants pour vos joueurs… Empruntant un titre à un déjà très vieil article de Dragon Magazine (édition française).
Il est parfois difficile de faire naître une véritable sensation de péril pour vos PJ, face aux ennemis… Certes, vous êtes “en combat”, mais vous êtes aussi assis autour d’une table, entre amis, avec de la pizza froide et des petits gâteaux. Trop souvent, les combats sont transformés en une suite de chiffres, les adversaires, comme clonés, fonçant sur nos héros les uns après les autres comme à la parade, combattant sans mollir avec les sempiternelles mêmes attaques, jusqu’à la fin…
On se croirait dans un RTS. Avec ce genre de combats, pas étonnant que les joueurs ne craignent plus grand chose… Pas étonnant que les fans de roleplay pur ne fassent qu’attendre que la partie “combat tactique avec figurines” de Pathfinder se passe, pour pouvoir enquêter ou négocier de nouveau… Bref, interpréter leur personnage de nouveau. Bonjour l’immersion… Il vous faudra faire mieux que les pseudo IA des jeux vidéos si vous voulez éveiller l’intérêt des joueurs !
Exposons ici quelques pistes pour rendre vos combats plus palpitants, avec des exemples en italique.
Ce sont des conseils de base, à mon sens, mais qui tournent tous autour de la même idée : la personnalité des monstres n’apparaît pas seulement en dehors du combat, rendez-les donc “vivants” !
Premier conseil… Employez aussi le combat sans plan. Le combat tactique avec cases et figurines, c’est bien joli, mais vous n’êtes pas forcé d’utiliser ces règles pour TOUS vos combats, surtout si votre groupe n’est pas entièrement axé là-dessus. Pour les petites rencontres, avec un ou deux monstres, accélérez les choses en éludant le dessin d’un plan. Le combat tactique n’est vraiment utile que lorsque les adversaires sont nombreux, ou la scène spectaculaire…
Je trouve que le combat “narratif” vous force beaucoup plus à décrire les monstres et leur position, leur tactique, l’environnement… Et donc à y réfléchir. De même, les joueurs devront décrire les actions de leur personnage en français clair (voire héroïque) plutôt que de passer en “langage D&D télégraphique”, style “Pas de placement, deux mains sur lui… 17, 2d6+6… Je Cleave l’autre.” C’est l’essence même du jeu de rôles que de s’investir dans la description et l’imagination !
Une rencontre autrement facile avec à peine un monstre par PJ, bien mise en scène, est d’autant plus immersive lorsque vous ne la voyez pas “de haut” avec des figurines mais que vous l’imaginez à la première personne !
Mes PJ avançaient dans un marécage, entre les tourbières… Ils se sont fait surprendre par des morts-vivants émergeant de la boue pour leur agripper les jambes, en commençant par le dernier membre du groupe ! Il n’y avait un adversaire de moins que de PJ dans le groupe, et ils les auraient vaincu facilement s’ils avaient pu élaborer une tactique avec une vue d’ensemble… En combat narratif, ils ont paniqué. Trois petits squelettes, et ils n’ont plus regardé les marais de la même façon !
Deuxième conseil, et non des moindres : Utilisez les pouvoirs de vos monstres. Qu’il s’agisse de monstres intelligents, de mort-vivants, de golems programmés, seuls ou en groupe, tout monstre doté de pouvoirs spéciaux, de magie, d’objets qu’il emporte au combat ou d’armes naturelles sait s’en servir. Les PJ essaient d’utiliser le bon pouvoir dans la bonne circonstance pour faire un maximum de dégâts avec un minimum d’efforts… Les monstres, c’est pareil.
Vu la quantité des ennemis, faites-vous des pense-bêtes dans vos notes… Même les zombis utilisent des armes, le cas échéant. Le dragon emploiera ses sortilèges et son souffle (en volant si possible) avant de recourir à ses (multiples) attaques. Un golem n’oublie jamais ses instructions, pas plus qu’il n’oublie ses attaques spéciales. Les loups et autres prédateurs attaquent en meute, tendent des embuscades, et savent d’instinct qu’il vaut mieux attaquer le plus faible et le traînard du groupe.
Vos monstres ont des pouvoirs et des capacités, des sorts, des niveaux de classe, c’est marqué dans le manuel… Vous n’avez aucune excuse si, quand vous oubliez de les utiliser, vos joueurs trouvent la rencontre trop facile !
Dans un article précédent, je vous avais parlé de gobelins établis dans une tour en ruine, avec un géant, un ours, un chamane et son apprenti. Dans mes notes, j’ai détaillé non seulement les attaques spéciales de l’ours et du géant, mais j’ai aussi recopié les informations de base des sorts préparés, les armes, les capacités telle que la vision nocturne, etc. Chaque type d’ennemi a sa propre feuille en marge du scénario, pour que je puisse tout avoir sous les yeux sans avoir à tourner les pages en combat.
Troisième conseil : Modifiez vos monstres. Personnalisez-les. Un monstre n’est pratiquement jamais comme son entrée dans le Bestiaire… Ne serait-ce que parce que la plupart des joueurs connaissent ce bouquin par cœur, ainsi que tous les clichés liés à ces monstres au cinéma, dans les wargames et les MMORPG. Même si vous faites dans le “classique”, sachez que tous les orques n’ont pas de javeline, que tous les sorciers n’ont pas Projectile Magique, ni tous les gardes une épée bâtarde…
Rendez vos monstres originaux, changez leur aspect, leurs tactiques, leurs armes et leur comportement en fonction de leur pays d’origine. Les revenants d’une ancienne civilisation n’auront pas les mêmes armes que les zombis récents, des orques sauvages se battront sans doute tout en dextérité avec des javelots et des embuscades, mais des orques qui ont été mercenaires pour un nécromancien se battront avec des tactiques plus conventionnelles, avec épées et armures d’acier.
Vous pouvez même changer les pouvoirs… Pensez à la surprise de vos PJ lorsqu’ils découvriront que ces hommes-lézards sont d’une sous-espèce capable d’émettre des chocs électriques et de respirer sous l’eau !
Il est assez original pour les gobelins d’avoir géant à eux… Ils ont obtenu le cor de contrôle des géants auprès d’un employeur (secret à ce stade) qui leur donne un meilleur équipement que celui de base (des armures, notamment). De plus, les gobelins fabriquent des bombes incendiaires en plusieurs formats qu’ils n’hésiteront pas à utiliser contre les PJ, notamment dans les couloirs de leur tour, pour les empêcher d’avancer ou couper leur retraite, et pas seulement pour faire des dégâts !
Quatrième conseil : Même sans les pouvoirs et capacités, utilisez des tactiques. Encore une fois, vos PJ le font… pourquoi pas vos monstres ? Les tactiques rendent les monstres plus vivants, plus originaux, parce que tous les monstres n’utilisent pas les mêmes. Préparez-vous, dans vos notes, les différentes stratégies qu’utiliseront vos monstres, en fonction de leur personnalité ou de leur comportement typique. Les manuels vous donnent des indications, mais sentez-vous libre d’en dévier !
Il se peut que des monstres très stupides, enragés ou protégeant leurs petits combattent jusqu’à la mort, mais c’est assez rare en dehors des zombis ou des golems… Sachez-donc bien quand les monstres sont susceptibles de fuir. Ne mettez pas que des blocs de caractéristiques dans vos notes, écrivez aussi des rappels tels que “Pour l’embuscade, les guerriers occupent les PJ pendant que les archers tirent; tentative de fuite si le chef et/ou X membres du groupe sont tués”.
C’est une tactique très basique et prévisible, mais ce n’est qu’un exemple… Même les monstres qui ont un malus en Intelligence peuvent enfanter de grands généraux : Les chiffres ne vous donnent qu’une moyenne !
Mes gobelins sont intelligents. Ils enverront en priorité l’ours et le géant pour faire fuir leurs adversaires, se tenant à couvert pour lancer des sorts et tirer à l’arc. Leur antre est une tour stratégiquement placée, ils verront arriver des attaquants de loin. Ils évacueront leurs femmes et leurs enfants par les tunnels de secours si le danger leur semble important, et laisseront certains membres de la tribu derrière pour éliminer la menace. Ils ne se rendront qu’acculés, certains que les autres gobelins sont saufs.
Cinquième et dernier conseil important : Utilisez le terrain. Certes, cela rentre dans la case “tactique”, mais cela mérite une entrée en propre… Pour la bonne raison que c’est vous, le MJ, qui créez le terrain. Même les monstres dotés d’une intelligence animale utilisent le terrain à leur avantage, piquant lorsqu’ils sont capables de voler, fondant depuis une hauteur, se camouflant ou restant à couvert pour mieux surprendre… L’araignée ne tend pas sa toile n’importe où.
Les monstres, comme les PJ, chercheront à attirer leurs proies sur leur terrain de prédilection, de préférence un terrain où leurs proies sont handicapées (le crocodile attire sa proie, terrestre, dans l’eau). Ils chercheront à minimiser leurs faiblesses et augmenter l’importance de leurs forces. De même, s’ils connaissent leur cible, ils chercheront à exploiter ses réactions probables et ses caractéristiques physiques pour mieux la tuer…
Lorsque vous créez les lieux d’une rencontre, sachez à l’avance si les monstres sont prêts au combat, entraînés, et comment ils utiliseront le terrain pour tenter d’avoir l’avantage… Et au désavantage des tactiques de prédilection des PJ !
De l’extérieur, la tour des gobelins semble inhabitée, les étages détruits. L’escalier des caves est fermé par une trappe qui grince, et parsemé d’ossements qui donnent un aspect sinistre. En craquant sous les pas, ils servent d’alarme aux gardes ! Des débris empilés apparemment au hasard servent de couvert à des archers, et une simple fosse recouverte d’une toile grise, peu visible pour qui n’a pas la vision nocturne, attends les intrus en bas de l’escalier… Et ce n’est que la première pièce !
Les gobelins ont aussi criblé les caves de la tour de galeries parfois difficilement repérables et cachées derrière des débris, pouvant ainsi prendre les PJ à revers. Ils ont percé de petits trous dans les murs d’un couloir, et se cachent dans des pièces latérales creusées dans la pierre pour tirer à travers… Les trous sont à hauteur des torses et des têtes des humains et des nains, les gobelins ne craignent donc pas de blesser les leurs, plus petits : Ils savent qui sont les attaquants potentiels.
Au besoin, les gobelins peuvent déclencher une chute de pierres dans l’escalier qui mène au niveau inférieur, de préférence sur la tête des PJ, ou simplement pour rendre l’accès plus difficile et retarder encore les assaillants…
Bien sûr, vous n’êtes pas obligé de jouer à Patton ou à Napoléon, ni de vous casser la tête à chaque rencontre. Pas besoin de faire compliqué ni d’élaborer des tactiques incroyables à chaque nouveau monstre : Il est permis de réutiliser les stratégies, bonnes ou mauvaises, et même de créer des monstres stupides qui ne les utilisent pas ! Le problème est d’ailleurs, pour certains MJ, de laisser leurs monstres faire des erreurs face aux PJ…
Cependant, vous voyez que, dans ces exemples tirés de mes scénarios, on est bien loin de la rencontre aléatoire de sprites sans personnalité combattant à l’épée et jusqu’à la mort les aventuriers qui baillent. Mes joueurs ont d’ailleurs apprécié d’avoir à réfléchir face à ce qu’ils pensaient n’être “que quelques petits gobelins, niveau 1, faciles à tuer”, et ont dû faire retraite pour s’y reprendre à deux fois avant d’éliminer ce “nid”, qui était en fait un village, un fort bien défendu…
Après avoir conquis les deux petits niveaux de la tour pièce à pièce, avec difficulté, bien que face à une poignée de combattants, ils se sont aperçus que le gros de la tribu n’était plus là depuis longtemps… Ils avaient dépensé tous leurs sorts et toutes leurs potions pour récupérer de leurs nombreuses blessures. Epuisés, alors qu’ils campaient non loin de la tour, ils se sont mis à trembler, redoutant le retour des ” petits gobelins faciles à tuer”
Ils croyaient voir partout leurs yeux à la limite de la lueur de leur feu de camp, dans la nuit noire… Je n’ai pas voulu les décevoir : les gobelins aiment aussi lancer des raids successifs peu risqués pour avoir leurs ennemis à l’usure…
Mais brisons-là… Il serait trop long (voire impossible) de vous raconter toutes mes parties, de vous détailler toutes les tactiques possibles pour chaque monstre. Dans un autre article, je vous donnerai peut-être des exemples, ce qui sera plus explicite. Il vaut mieux chercher vous-même que de vous fier à des formules ou des recettes ! Qu’il vous suffise de savoir qu’un combat qui ne donne pas une impression de danger, c’est un combat plan-plan, utile dans une histoire uniquement pour son effet comique.
Et puis, provoquer l’appréhension chez les PJ, c’est bien… Mais la faire naître chez les joueurs, c’est la plus belle récompense d’un bon MJ !
Voilà un article très utile qui permet de diversifié ses rencontres et de faire varié les plaisirs. Trop souvent ont tombe sur des MJ avec la tendance de lâcher du menu fretin et ensuite de mettre un BOSS carrément trop fort. N’étant pas spécialement fan de la monter par dépeçage de montre (parce-que je trouve pas que ce soit particulièrement équilibré), je préfère faire des rencontres qui chacune ai du sens, qui soient logique et qui mettent, presque! toute en réel situation de danger. Il faut de tout, des adversaires un peu con, des faibles qui ont pensé leurs affaires, des forts qui dans un premier temps sous estime leurs adversaires, et des forts qui y vont a fond directement sans préalable.
Au final, rien qu’hier, l’un de mes joueurs a dis adorer quand les combats arrivent car a chaque fois, il se sent vraiment dans son perso (qui est un bagarre) qui, autant est très fort, autant il peut être vulnérable. Du coup, il se sent presque! toujours dans une situation difficile et ça relève d’autant plus le goût du combat de la victoire. (Je précise qu’il adore aussi les phases sans combat. Rien qu’au dernier scénar, il a failli ne pas y en avoir du tout, et pourtant il à adoré^^)