FBI 2 : Faux Persos Cools !

Où Mucius, sur un ton péremptoire parfaitement insupportable, vous parle des personnages qui semblent cools et intéressants, et qui, en fait, ne le sont pas… Les Fausses Bonnes Idées appliquées par les joueurs !

Eh oui ! Il n’y en a pas que pour les MJ…

Des personnages qui ont l’air originaux, ou simplement géniaux… Mais qui vont au mieux vous barber au bout d’une séance, insupporter les autres joueurs, ou même aller jusqu’à détruire le scénario ! Bon, d’accord, peut-être pas détruire le scénario… Ce genre de chose est plus une question de joueur que de rôle. Mais autant il y a des joueurs qui peuvent détruire un scénario avec n’importe quel perso, autant il y a des persos qui sont prédisposés à cela…

A qui la faute ? S’il vous faut quelqu’un à blâmer, ne vous en prenez pas toujours au joueur : il arrive bien souvent qu’il n’ait pas conscience de son erreur. Blâmez le MJ, qui n’a pas su dire “non” au seul moment où il le pouvait encore sans passer pour un dictateur du TGCM : avant la partie. Si, en tant que MJ, vous sentez qu’un personnage n’est pas adapté à votre scénario ou à votre jeu, n’hésitez pas à en discuter avec le joueur pour trouver quelque chose de plus approprié…

Ce n’est pas parce qu’un rôle est excellent qu’il convient pour toutes les pièces !

C’est la première erreur des MJ et des joueurs concernant les personnages : Choisir un personnage mal adapté au jeu.

Contrairement à ce qu’on pense souvent, il y a peu de jeux “universels”, qui permettent de jouer tout ce qu’on veut. Même GURPS ou BASIC, qui sont des systèmes réellement polyvalents, doivent être adaptés à chaque “univers”. Le fond et la forme, le style et la substance d’un jeu de rôles, sont intrinsèquement liés. N’essayez pas de jouer, par exemple, un personnage inutile en combat dans D&D… Même les magiciens sont plus “Indiana Jones” que “Stephen Hawking”.

La mésaventure m’est arrivé à Shadowrun… Sans changer les règles, j’ai fait une sorcière vaudou (une Mambo) plutôt efficace, mais qui n’était pas foncièrement une meurtrière ni une criminelle. Elle avait des compétences liées à son histoire personnelle qui n’étaient pas “optimisées” pour le combat, parce que je pensais que ça serait plus amusant et riche. Elles était plutôt gentille… Sans aller jusqu’à défendre la veuve et l’orphelin, elle n’était ni froide, ni sans scrupules.

Eh bien, mes enfants… A Shadowrun, c’est tout ce qu’il ne faut pas faire. Aucune de ses compétences “background” n’a jamais été exploitée par aucun MJ, et elle se sentait aisément distancée par la plupart des autres personnages (optimisés, eux). Les scénarios typiques de ce jeu, missions de vol, d’infiltration ou d’assassinat, ne lui convenaient absolument pas. Forcé de suivre le groupe, je me suis maintes fois demandé “qu’est-ce que je fous là ?”…

La faute au MJ qui n’a pas su ou pas voulu faire un scénario en fonction des personnages ? Oui… Et non.

Ma faute, pour n’avoir pas vu que ce jeu était fait pour jouer les tueurs de sang froid… Parce que les autres personnages l’étaient, qu’ils étaient dans le ton général du jeu et de son histoire, et que le scénario n’aurait absolument pas été adapté à LEURS personnages s’il avait été adapté au mien. Si nous avions tous décidé de faire “atypique”, cela aurait peut-être été différent, mais alors à quoi bon jouer à Shadowrun ?

Jouer à un tel jeu avec des personnages “bisounours”, c’est manquer son but.  Même chose avec les règles… Avant de permettre un changement de règles pour que tel joueur fasse le PJ de ses rêves, réfléchissez à deux fois ! Un ingénieur peut bricoler un frigo pour qu’il cuise les aliments, mais ça ne sera ni aussi pratique, ni aussi facile, ni aussi compact, ni aussi efficace qu’un four. De la même manière, bricoler un jeu pour pouvoir jouer un perso plus à sa place ailleurs, c’est… Dur. Au mieux.

Ma sorcière fut inadaptée au style de son jeu, mais elle en suivait les règles de base. Il y a pire : un autre personnage, tireur d’élite à Donjons et Dragons. Peut-être les règles étaient-elles alors mal conçues… Mais il reste quasi impossible, sans refondre le jeu, de rendre “rentables” les armes à feu sans les rendre ridicules et irréalistes (temps de rechargement, munitions, dégâts…) dans un jeu où les magiciens peuvent tirer facilement une boule de feu en un demi-round de combat.

Il est déjà difficile de rendre les arcs efficaces à Pathfinder… Mais passons.

Autre type de personnage qui ne convient pas (du moins pas sur le long terme), le personnage “pour le fun“. Oh, vous savez très bien de quoi je veux parler… Les personnages qui se résument à leur “gimmick” qui ont des voix bizarres, des accents et des défauts de prononciations, qui ont un concept étrange et rigolo, ou basé sur une blague… Le gnome maladroit, le barde qui chante faux, le super héros qui a le pouvoir de télékinésie uniquement sur les gâteaux, ou de faire pousser les cheveux…

Même si vous arrivez à le rendre utile au groupe, en combat ou dans d’autres situations, le personnage qui a pour seul intérêt d’être un genre de gag récurrent devient vite lassant : au bout d’une séance, le gag n’a plus d’intérêt, et le perso non plus. Au bout de deux séances, c’est comme Jar-Jar Binks… Tout le monde a envie de le tuer. Oh, vous pouvez donner des traits particuliers à votre personnage sans aucun problème… Mais ne le basez pas là-dessus.

Ces concepts ont souvent cours dans les jeux où on peut “tout” jouer, ou les jeux qui offrent une myriade de pouvoirs… Exemple frappant : un de mes joueurs avait commis “monsieur trou-trou” (sic), qui pouvait rebondir sur les ennemis comme Super Mario… Et qui en avait le tempérament répétitif. Infect. Comparez à cela un autre super-héros, “Ultrasonic”… Québécois, son “gimmick” est son accent, mais il est plus profond que cela : il a une histoire et des pouvoirs qui n’y sont pas liés.

Ce personnage se rend attachant, comme Spiderman avec son sens de la répartie parfois vaseux.

Il y a un certain nombre de types de personnages que j’appellerai “à risque“… Ils ne le sont pas forcément pour tout le monde, mais, en ce qui me concerne (et je reconnais le côté complètement idiosyncrasique et subjectif d’une telle liste), ils sont le signal que quelque chose ne va pas, que le concept n’est pas adapté, ou que le joueur est en train de faire un autre “Monsieur Trou-trou”, “Jar-Jar Binks”, et ainsi de suite.

Evitez de faire jouer des enfants. Un enfant est moins compétent, moins mûr émotionnellement, plus fragile, voire naïf… Il faut donc que le PJ soit “compensé” à l’aide de pouvoirs, d’une grande intelligence, d’un protecteur… Et là, on tombe dans le syndrome du “petit génie”. Wesley Crusher, Will Robinson, Anakin Skywalker… On a juste envie de les étrangler ! Et joué par un adulte, même “correctement”, c’est pire. Je le sais, j’ai eu le malheur d’accepter un tel perso à ma table.

A Pathfinder, évitez aussi les races d’animaux anthropomorphiques. Même équilibrées, même dans un univers ou elles n’étonnent plus personne (SURTOUT dans un tel univers !), évitez. Les hommes-chats avec des comportements félins, c’est souvent limité et ça tourne au “gimmick” assez vite. Les “furries”, c’est connoté. Particulièrement les femmes-renards et autres “cat-girls”. Surtout si elles ont des poitrines opulentes.

Même les loups-garous, c’est tendancieux… Et puis ils sont souvent trop puissants. J’y viens, d’ailleurs…

Tous les problèmes cités jusque là viennent en fait d’une seule et même chose : le laisser-faire du maître de jeu en matière de personnage. Il faut savoir repérer les joueurs qui posent problème autant que les concepts louches… Ne jamais laisser le champ libre à un joueur qui a décidé de “battre” le MJ, ou de “gagner”, ou de “trouver la faille” du scénario ou des règles, d’avoir l’avantage dans le groupe… Bref, ne vous laissez pas gâcher la vie.

Ne permettez pas les races “bourrines”, les classes déséquilibrées… Mettez-vous tout de suite d’accord sur les règles qui posent problème lorsqu’un minimaxeur fou vous dit qu’il veut jouer tel ou tel “build” et commence à faire des combinatoires… C’est peut-être un peu péremptoire (il y a des gens qui jouent comme ça, après tout… Voyez D&D 4… Mais est-ce encore du jeu de rôles ?), mais je considère qu’on joue un rôle, pas un “build”. Il n’y a pas loin de la combinatoire à la combine.

En particulier, méfiez-vous des gens qui veulent jouer des fous, des paranoïaques, des tueurs, des asociaux… Souvent, loin de s’intéresser aux conflits internes, ils utiliseront cet élément de background comme “permis de tuer” face à n’importe quel PNJ, ou comme sauf-conduit rôlistique pour faire n’importe quelle action socialement inacceptable, mais qui les arrange bien, sous prétexte que c’est “ce que ferait leur perso”. Et même s’ils jouent vraiment la folie, c’est pire…

Vous avez déjà côtoyé un vrai sociopathe ? Un type comme ça détruit un scénar différemment, mais tout aussi complètement.

Une compensation au fait de permettre une race bourrine, officiellement utilisée dans D&D3.5 et heureusement abandonnée dans Pathfinder, est de faire commencer les autres joueurs à un plus haut niveau. Sachez-le, ce n’est qu’un pansement, et en plus c’est un pansement qui déséquilibre le jeu, point. Ne permettez pas tout, car tout n’est pas jouable dans tous les systèmes… Voir plus haut l’exemple du frigo et du four. Vous voulez jouer un Vampire ? Jouez à Vampire !

Evitez donc de commencer avec un groupe ultra-puissant, qu’il soit disparate, monstrueux, ou pas… Fausse bonne idée ! Cela peut faire très plaisir aux joueurs d’avoir plus de pouvoirs, de commencer au niveau 10, mais il faut toujours un temps d’adaptation pour que le groupe apprenne à fonctionner ensemble avec les nouveaux persos, se fasse à ses facultés, et surtout finisse par vraiment “trouver le rôle” de son personnage. Cela ne correspond pas avec l’idée qu’on se fait de vieux routards.

De même, évitez les créatures de type vampire, anges et démons, demi-dieux et dragons… Sauf à jouer à un jeu fait pour cela (Vampire, In Nomine, Nobilis…) ! A Pathfinder et D&D, je suggère de faire commencer vos PJ au niveau 3 maximum, surtout s’il s’agit d’un nouveau groupe ou de joueurs peu expérimentés. Ou que vous-même n’êtes pas très expérimenté. Trouver des défis adaptés à des personnages puissants et atypiques, c’est beaucoup plus dur…

Ne permettez pas non plus un background qui vous met mal à l’aise d’une manière ou d’une autre.

Ce n’est pas une question de puissance ou de règles… Et ce n’est pas qu’une question de background de psychopathe. Il y a des fois ou on “ne le sent pas”. Certes, je recommande d’opposer un ferme véto aux backgrounds du style “Mon personnage est tourmenté par des voix intérieures venues des enfers, et a violé sa petite sœur, mais elle lui a pardonné et ils voyagent ensemble, il la protège donc…” (background qu’on m’a réellement soumis, soit dit en passant !).

Ils causent l’inconfort de toute la table, même quand ils ne sont pas gratuits et que le joueur est prêt à jouer son rôle jusqu’au bout. C’est d’ailleurs ce qui fait le plus peur… Qu’il aille jusqu’au bout dans un tel rôle. Evitez donc de faire trop “dur”, à moins que tout le monde ne soit d’accord ou que le jeu se prête à ne voir jouer que des psychopathes (ce qui reste rare, même à Vampire ou Shadorwun) : c’est un vendredi soir entre potes, pas la Liste de Schindler, ni SAW du point de vue du tueur !

Autre genre d’inconfort… L’amour, la haine. Evitez de laisser les joueurs faire deux PJ amoureux. Je l’ai déjà dit dans un autre article : s’ils le sont dans la vie, ça fait des histoires à chaque rupture ou dispute, et s’ils ne le sont pas c’est un gimmick qui met tout le monde mal à l’aise.  De même, acceptez les backgrounds de personnages qui peuvent entrer en conflit, mais pas ceux qui s’opposent résolument dans leurs buts : le jeu de rôles n’est pas un jeu dans lequel les PJ entrent en compétition.

Il en va de même pour deux PJ maître et serviteur… Si un PJ peut être puni pour avoir désobéi à un autre, il y a un problème. Le jeu de rôles, c’est aussi la liberté.

Aussi, n’imposez pas. On le saura, il y a quelque chose de dangereux à être trop permissif… Mais mieux vaut savoir guider que d’interdire formellement. La discussion vaut toujours mieux que d’imposer quoi que ce soit, et il n’est pas interdit d’exposer simplement ce que vous attendez d’une partie, et de donner des conseils quant à la constitution d’un groupe susceptible de mener à bien l’histoire que vous avez en tête…

Ecoutez aussi les revendications de vos joueurs, qui ont peut-être aussi des suggestions (voire des doléances)… Par exemple, ils peuvent tous vouloir explorer telle ou telle région de votre univers de prédilection, ou changer de style de personnage, ou vouloir plus d’action, plus d’enquête… Il ne leur est pas interdit non plus de vous faire part de ce genre de chose, et c’est aussi à vous de vous adapter, de trouver quelque chose qui permette à tout le monde (y compris vous) de s’amuser.

Si la réponse à tous les dilemmes ci-dessus vous semble être d’imposer des contraintes de background détaillées aux joueurs, comme “vous êtes tous obligatoirement des frères, des garçons, venus de tel pays avec tel nom de famille, vous avez à peu près tel âge, vous avez tous investi d’office dans la même affaire familiale à la mort de votre père, et vous avez tous émigré vers telle ville pour ce faire…”, réfléchissez-y à deux fois !

Entre parenthèses, on m’a réellement soumis cette dernière contrainte de background, à moi et d’autres joueurs… Le scénario est en cours, et je garde l’esprit ouvert, mais le résultat n’est pas probant pour l’instant.

Parce que, bon… Si vous en êtes à ce point là pour pouvoir faire jouer votre “histoire géniale” (qui risque d’ailleurs de ne pas être si géniale que ça, même s’il y a des exceptions…), proposez un choix de pré-tirés au lieu de frustrer les joueurs dans leur créativité, ça va plus vite. La plupart des joueurs trouvent plus leur bonheur dans un personnage générique qu’ils s’approprient au fur et à mesure que dans un personnage trop compliqué et ultra-spécialisé de leur fabrication.

Et ça non plus, ça n’est pas interdit !

  1. Pour faire suite à ce que j’avais dit à la fin de cet article… La campagne dans laquelle nous étions tous frères venus d’un même pays, effectivement, est partie en c… quenouilles, royalement, tombant dans le grand n’importe-quoi déséquilibré. Cela s’est passé il y a déjà longtemps, à peine quelques mois après l’écriture de cet article. Comme quoi, j’avais bien raison !

  2. Dans la campagne que je joue en ce moment, j’ai demandé a mes joueurs de se limiter aux races et classes de bases (avec celles de prestige) de pathfinder. Car bien souvent, les joueurs ont tendances, en tout cas une partie des miens, a faire des personnages qui sont marrant en eux mêmes, mais pas a joué. C’est marrant 5 minutes, mais après ça lasse. C’est comme une grosse blague baveuse. Ça peut éventuellement faire rire une fois mais guère au delà (et encore, moi ça me laisse de marbre).

    Le but de ma démarche était de revenir a des jeux un peu plus “a l’ancienne” avec des personnages “simples”, mais fort => une personnalité, une histoire, un comportement, des capacités etc… Suffisamment éculé pour que tout mes joueurs aient déjà des exemples en têtes de “modèles” a suivre.

    Oui ça les brides beaucoup, mais au final, ils en sont très content, car grâce a cette limitation que j’enlèverais si jamais je masteurise une autre campagne (mais j’aimerais bien joué a Pathfinder aussi, pas que la masteurisé^^), on a vraiment pu faire une campagne qui tient la route, qui soit a la fois épique, intéressante, réaliste (pour l’univers^^) etc… Et pas se coltiner avec un ours qui parle en rime 5 minutes et après le joueur a plus d’idée de rime ou se lasse du truc… Sympa sur un one shot, mais guère plus.

    J’essai, lors des créations de PJ de guider les joueurs dans leurs créations, mais bien souvent, ils sont assez obstinés sur leurs idées de base qui, je sais par expérience, n’amèneras rien de vraiment bien.

    C’est pas la partie la plus évidente du maître du jeu et un mauvais personnage peut vraiment ruiner une partie.

    Je ne préconiserais rien a personne, il faut faire selon ses joueurs et selon ses propres envies. Car il ne faut surtout pas s’oublier soi même. Ne pas laisser les joueurs tout faire et dire oui a tout.

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