J’aime, j’aime pas.

Où, dans un post qu’il a hésité à sobrement intituler “l’avenir du JdR”, Mucius vous explique ce qu’il aime dans le paysage rôlistique, et ce qu’il aime moins… grâce à des listes. Mais bon, lui, c’est lui. Et vous, c’est vous. Il dit ça, il dit rien.

Les choses que j’aimerais que plus de jeux fassent:

  • Remplacer le mot “race” par “lignée”, “culture”, ou “ancêtres”, comme Pathfinder II. Parce que l’idée de race est un construct sociétal.
  • Décourager activement les solutions violentes, par exemple en donnant des points au MJ lorsque les PJs escaladent les choses en premier, comme Star Trek Adventures. Parce que la violence doit être le dernier recours.
  • Avoir un mécanisme qui permet aux joueurs de jouer d’autres personnages lorsque le leur n’est pas présent, gardant tout le monde intéressé à la table, comme Star Trek Adventures. Parce qu’on ne doit exclure personne.
  • Pouvoir entièrement se passer d’un système monétaire, n’utilisant que le narratif ou un système de réputation ne dépendant pas de ce qu’on trouve ou gagne, comme Eclipse Phase. Parce que la réussite ou le bonheur n’ont pas à être obligatoirement liés à l’argent.
  • Ne pas “forcer” le roleplay pour ceux qui sont intimidés ou nouveaux, ou ceux qui n’aiment pas trop s’investir émotionnellement un vendredi soir entre ados, mais offrir des avantages en termes de règles à ceux qui s’en servent, comme D&D5. Parce qu’on ne doit pas forcer quelqu’un à se dévoiler intimement.
  • Donner du pouvoir narratif à tous les joueurs à la table, leur permettant de décrire les scènes et d’inventer l’histoire en toute égalité, comme Fiasco. Parce qu’il n’y a pas plus de maître qu’il y a d’esclaves entre amis.
  • Ne pas comporter de système de combat, ne pas être un système de combat, comme le jeu Austenien Good Society. Parce que le combat n’a jamais à être la seule solution, et que toutes les situations ne sont pas des conflits.
  • Définir les personnages par leur caractère et leur archétype plutôt que par leur “race” et leur “classe” ou leur “profession” ou leurs “compétences”, comme Monster High. Parce qu’un individu ne doit pas être réduit à son travail, ni à ce qu’il sait faire qui soit “utile” ou qui lui permette de gagner des sous.
  • Permettre aux joueurs de ne pas être condamnés par de mauvais jets de dés, par exemple avec une économie de points, comme Numenéra. Parce que tout le monde peut être malchanceux, et qu’il est bon d’avoir un système qui aide ceux dans le besoin pour qu’ils continuent à s’amuser.
  • Toujours donner le choix aux joueurs de réussir ou non leur action et placer ce ressort dramatique entre leurs mains, en ne présupposant pas qu’ils voudront gagner à tout prix mais simplement raconter une bonne histoire, comme FATE. Parce que celui qui subit, c’est celui qui choisit.
  • Avoir un univers qui n’est pas désespéré ou sombre, qui est ouvert aux émotions positives, et dans lequel les PJs sont une force de changement positif dans le monde, comme Friponnes RPG. Parce qu’il est important de rappeler qu’un monde meilleur est possible, et que le changement aussi.
  • Donner systématiquement le choix au MJ quant à quoi inclure dans ses campagnes, en termes de background et d’univers, tout en fonctionnant, en restant cohérent et en proposant de nombreuses options, comme Vampire: le Requiem, et les jeux du MdT2 en général. Parce qu’il faut refléter la diversité des joueurs…
  • Intégrer directement des problématiques queer, non-blanches, non oppressives, et une manière safe de jouer… comme Monster High ou Monster Hearts. Parce que les joueurs, aujourd’hui, ce sont des joueurses.

 

Les choses que j’aimerais que moins de jeux fassent:

  • Répandre, sous prétexte de réalisme, des clichés homophobes, violents, invisibilisants, sexistes, racistes, sans aucune raison historique… Comme The Witcher, le Jeu de Rôles. Parce que nous sommes en 2019, merde.
  • Répandre des clichés colonialistes et violents en faisant que tuer et voler ceux d’une autre culture (les “races mauvaises”) soit le passage obligé de l’acquisition de puissance, de fortune et de gloire pour les personnages… comme tout ce qui est OSR. Parce qu’il est temps que le JdR ne soit plus l’affaire des hommes hétéros-cis-blancs.
  • Être basé entre autres sur la nécessité de l’échec, ou dire aux joueurs “non, tu ne réussis pas”, ou “vous avez gagné, mais seulement temporairement”, comme l’Appel de Cthulhu. Parce que le choix, c’est le JdR, et que le choix n’a de sens que s’il y a la possibilité d’une réussite.
  • Forcer les joueurs à en opposition avec ceux qui leurs donnent des ordres et devoir les suivre quand-même, avoir un “devoir” opposé à un “désir”, supposant que tous les habitants de cet univers sont en conflit avec la société comme le Livre des Cinq Anneaux, 5e édition. Parce que c’est une fausse dichotomie, et qu’il faut croire en une meilleure société.
  • Sans vraiment en parler, forcer les joueurs à jouer des oppresseurs dans un système de caste rigide, comme le Livre des Cinq Anneaux, toutes éditions confondues. Parce que peu de gens ont consciemment envie d’opprimer les gens, même si certains sont nés oppresseurs. On choisit ce qu’on joue.
  • Sans vraiment en parler, forcer les joueurs à jouer des opprimés et des criminels dans un univers impossible à révolutionner, comme Cyberpunk. Parce que trop de gens sont déjà opprimés. On choisit ce qu’on joue.
  • Forcer le roleplay en faisant que le jeu ne fonctionne pas ou que les joueurs n’ont pas de points à dépenser s’ils ne jouent pas leurs “Aspects”, récompensant uniquement ceux qui ne sont pas timides ou introvertis… comme FATE. Parce que forcer à se dévoiler, c’est, quelque part, un viol.
  • Avoir un système compliqué, plein de sous-systèmes, et beaucoup, beaucoup de dés, sous prétexte de réalisme et de simulation… comme Shadowrun (toutes éditions). Parce que c’est un prix d’entrée élevé, en temps et en éducation.
  • Avoir un système qui, mathématiquement, au niveau des probabilités, ne marche pas… comme D6 ou Savage Worlds. Parce que… bah, ça marche pas, quoi !
  • Avoir un système de moralité qui n’influe pas vraiment sur le jeu, comme Star Wars: Force et Destinée. Parce que la philosophie et l’éthique des personnages, si manichéennes soient-elles, méritent d’être plus qu’un mécanisme plaqué.
  • Conditionner l’action du jeu à l’emploi de figurines (tout en prétendant le contraire, bien souvent), comme D&D4 ou Pathfinder. Parce que ce n’est pas une manière réaliste de représenter l’horreur d’un combat, que ça éloigne du roleplay, et que c’est un prix d’entrée en argent à un loisir qui n’en a pas besoin.
  • Enfermer les joueurs dans un cadre, un univers, un thème restreint, un métaplot lié au jeu, et de ce fait avoir une rejouabilité nulle, bref, proposer un scénario plutôt qu’un vrai jeu de rôles… comme à peu près tout ce qui est PBtA et indépendant récemment. Parce que le JdR n’a pas à tomber dans le “consommable” et le “jetable”.
  • Prétendre avoir un système universel qui convient pour absolument tout… comme le système 2d20 ou GURPS. Parce que ça marche jamais pour tout aussi bien qu’un système adapté, même si ça marche très bien pour certains cadres.
  • Plonger les joueurs dans une ambiance carcérale, dystopique et malsaine susceptible de briser les amitiés, par exemple en les poussant à se trahir et à soumettre leurs amis à des interrogatoires violents, comme Perfect Unrevised. Parce que c’est un jeu, pas une expérience de Milgram, et que nous ne sommes pas les cobayes les uns des autres. On n’a pas à encourager ce genre de connerie.
  • Forcer un joueur à aliéner le contrôle des actes et du roleplay de son personnage, au lieu de lui faire confiance pour bien jouer… comme Vampire, La Mascarade, 5e édition. Parce que forcer quelqu’un à faire, dire, commettre des crimes ou rester passif en regardant, surtout dans un jeu d’horreur émotionnelle et personnelle, c’est… un viol.
  • Avoir un système de jets de dés extrêmement indirects pour accumuler des réussites afin de remplir des jauges et d’accumuler des points pour simuler les actions longues… comme dans Star Trek Adventures. Parce que… pourquoi faire, au juste, si ton système de base résout déjà le problème ?

J’ai essayé de prendre à chaque fois un jeu différent (et surtout un jeu joué, pas un micro-système ou un jeu maison, car ce sont souvent des trucs bancals…) pour illustrer chaque point… Mais vous vous serez aperçu qu’un même jeu aurait pu illustrer beaucoup de points à la fois. Je voulais en citer beaucoup. bien entendu, même si certaines choses sont pour moi rédhibitoires, ce n’est pas parce qu’un jeu illustre un point positif qu’il est “bon” ou “parfait”, ou qu’il illustre un point négatif qu’il est “mauvais”.

Certains jeux illustrent même à la fois du positif et du négatif.

Je joue régulièrement à certains des jeux qui illustrent mes points négatifs, et presque pas, ou pas du tout, à certains des jeux qui illustrent mes points positifs… Par exemple, il m’arrive de jouer à D&D et de casser du gobelin, en dépit de cette mentalité blanche colonialiste. Je joue aussi au Livre des Cinq Anneaux 5e édition malgré certaines de ses faiblesses. Et je ne joue plus à Monster Hearts et Monster High parce qu’après quelques parties, j’ai le sentiment d’avoir tout fait et tout exploré de ce jeu. Et ça me va.

Ce sont mes impressions, ce ne sont peut-être pas les vôtres… Certains trouveront ma liste incomplète, d’autres trouveront même que dans ma liste de points négatifs, il y a des choses qui justement les attirent et leur plaisent. L’important, c’est de le savoir, et de vous faire votre propre liste… qui sait, avec des points très différents !

Certains abhorrent, par exemple, les listes de qualités, défauts et pouvoirs optionnels du système d10 (All Flesh Must Be Eaten) alors que ça ne me dérange pas. Certains adorent la complexité d’un Pathfinder ou d’un Exalted ou même d’un Rolemaster, alors que je conchie ce genre de chose. Il y en a qui jouent à des jeux aussi sombres que Kult, alors que ça n’est pas du tout mon truc.

Je suis de plus en plus convaincu qu’il n’y a pas de bon MJ, juste un MJ dont le style vous convient et qui est suffisamment ouvert pour laisser ses amis s’exprimer par le jeu… ce qu’il fait exactement, ses techniques, ce n’est qu’un détail. Le jeu que vous choisissez collectivement peut être ou non adapté à ce que vous voulez faire, mais ce que vous en faites, c’est vous qui le décidez. Personne ne peut vous dire comment jouer. Réfléchissez à vos jeux et à pourquoi vous les aimez, ça vaut tous les articles de conseils.

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