Magie, Mystères et Deux Ex Machina

Où Mucius cherche à rendre la magie un peu moins banale dans les jeux de rôles médiévaux-fantastiques… Si tant est qu’elle en ait besoin. Bref, à justifier le nom de la compétence “Arcanes” ou “Mystères” dans un monde où la magie n’a plus rien de mystérieux pour les joueurs.

Vous êtes en train de préparer la prochaine session de jeu, ou vous démarrez une campagne de Pathfinder, et vous choisissez les sorts de votre Orque Clerc du Mal dans la liste des clercs… Et vous soupirez. Si, si, je vous entends… Vous soupirez, non seulement parce que c’est une tâche ingrate, mais parce que tout ça manque sacrément de romanesque. C’est pareil pour les joueurs, hélas, et surtout ceux qui connaissent bien le jeu.

Beaucoup de MJ et de joueurs ressentent, à juste titre, que le système de magie des jeux auxquels ils jouent manquent de… de magie, en quelque sorte. Il y a plein de règles très spécifiques, de nombreux effets décrits avec soin pour éviter les erreurs d’interprétation, les limites et les coûts de chaque entrée, item et sortilège étalés à la vue du joueur et du MJ, la liste des effets magiques possibles ordonnée et raisonnée de manière fort pratique…

Et, en fin de compte, aucune place n’est laissée au Merveilleux.

Ce n’est pas très mystérieux; c’est même, à l’opposé de la magie qui fait rêver, plutôt prévisible. Cela ne ressemble pas vraiment, ou alors de très loin, à la magie incroyable des contes de fées, ou des mythes et légendes. On ne peut pas empêcher un vieux rôliste qui regarde les Dix Commandements avec Charlton Heston de se dire que “Moïse n’est qu’un prêtre de niveau 9 ou 10, pas plus”, et que “Gandalf a des sorts pourris, en fait”, mais tout de même…

C’est parce que, dans les histoires comme dans les films, la magie est sous le contrôle total de l’auteur. Elle ne suit qu’une seule règle : faire ce qui fait avancer l’intrigue. Même si l’auteur expose quelques unes des “lois de la magie”, ces lois n’existent que pour que la magie s’adapte mieux à la trame de son récit… Et elles peuvent de toute façon être transgressées de manière spectaculaire quand cela sert l’histoire. D’ailleurs, il n’a pas vraiment besoin de les exposer.

Presque personne ne demande pourquoi Gandalf ne peut pas se téléporter, bien qu’il semble apparaître là où on a besoin de lui… De même, personne ne pose la question ultime : pourquoi Sauron ne forge-t-il pas un “Anneau Unique 2.0″, le même en mieux ? “Ce n’est pas comme ça que ça marche”, nous dit-on. Ces personnages sont sacrés pour beaucoup, et, dans le roman, presque tout ce qui est magique a lieu en coulisse, jamais sur le devant de la scène… Voilà tout.

Dans un jeu de rôles, les PJ sont souvent des lanceurs de sorts “professionnels”, et cela change totalement leur point de vue. Aladin trouve peut-être les pouvoirs du génie pleins de mystère, mais le génie semble plutôt bien maîtriser ses propres facultés… encore heureux. Autre différence, les PJ ne sont pas sous le contrôle d’un seul auteur, et RIEN de ce qu’ils font ne se passe “en coulisse”.

Quelle que soit la façon dont les PJ altèrent la réalité du monde de jeu au mépris des lois physiques (magie, superpouvoirs, miracles, voyage dans le temps, super-science…), il y a des règles pour les empêcher de résoudre tous les problèmes simplement en claquant des doigts. Ces règles peuvent être décrites dans le livre de règles ou non, accessibles à tous ou seulement au MJ, très lâches ou au contraire se déclinant sur mille pages de listes et de sorts… Mais elles sont là.

Il y a deux manières de rendre la magie mystérieuse aux yeux des joueurs… C’est soit de la rendre plus aléatoire, soit de faire que les joueurs ne connaissent pas ces règles, totalement ou en partie. Dans les deux cas, il s’agit de priver les joueurs d’une partie du contrôle qu’ils ont sur la magie, de leur maîtrise de ses effets, ou de leur connaissance de la liste précise de ce que la magie peut faire dans le monde de campagne, et à quel prix.

Il devient bien vite évident que, à moins d’empêcher vos joueurs de jouer des lanceurs de sorts (et encore), ça ne va pas être facile de justifier tout ça. En fait, cette approche se planifie très tôt, lorsque vous concevez (ou bidouillez) votre monde de campagne avant le jeu… Il vous faut définir vos propres règles de magie pour votre monde de jeu, sans en faire réellement part à vos joueurs !

Au minimum, qu’ils ne sachent pas si vous avez changé quelque chose par rapport aux règles de base. Avec le système de Pathfinder, ne donnez pas de liste de sorts complète à vos lanceurs de sorts, ne les laissez pas choisir… Ne donnez à vos magiciens que les descriptions des sorts, pas les chiffres ! Demandez aux prêtres quel genre de miracle ils souhaitent accomplir pour la journée, et choisissez leurs sorts pour eux : C’est une prière, on n’est jamais sûr que ça marche !

Gérez tout l’aspect “chiffres” et dégâts des sortilèges, utilisez les descriptions et non les véritables noms… Enfin, vous pouvez aussi changer complètement le système de magie pour dépayser les gens (système des mots de pouvoirs pour Pathfinder, sorts différents et règles spéciales sur la magie de Conan, magie “entropique” et effets secondaires…) en gardant à l’esprit que les joueurs ne doivent pas avoir accès aux chiffres… Pas en début de campagne, et peut-être jamais !

C’est un lourd travail pour le MJ, mais ça vaut parfois le coup.

C’est aussi une question d’atmosphère. Habituellement, la magie est quelque chose d’idiosyncrasique, enseignée de maître à apprenti… Décrivez (ou faites décrire au joueur) quelques scènes d’apprentissage… Décrivez et faites décrire les effets des sorts, n’utilisez pas les noms qui sont dans le livre de règles, et arrangez-vous pour que chaque “école” de magicien ait des noms différents pour les mêmes sorts (“Roncier magique” ou “Equation Fleurie de Grammatus” pour Enchevêtrement)…

Il est difficile de justifier un tel changement de fonctionnement dans une campagne en cours, mais, pour peu qu’il y ait une apocalypse ou un cataclysme magique, tout est possible… Mais, dans tous les cas, vous aurez besoin d’une justification claire pour que les joueurs ne connaissent pas “exactement” ce que font leurs sorts. Après tout, si les magiciens étudient la magie, ils devraient avoir une bonne idée des lois qui la régissent, non ?

Premièrement, si vous gérez l’aspect “chiffres” de la magie, essayez de gérer l’aspect “chiffres” du reste du jeu. Quitte à vous taper tous les jets de dés de quelques personnages, autant tous les faire : décrétez que les joueurs n’ont plus accès aux chiffres des dégâts de leurs armes, de leurs score pour toucher, compétences, et ainsi de suite. Ils savent juste intuitivement que telle arme fait plus mal qu’une autre, et ils ne peuvent pas instantanément se comparer en terme de points.

Le jeu de rôle en devient une expérience beaucoup plus narrative, et pas déplaisante… Je l’ai vu faire, ça marche. Le MJ fait tous les jets de dés, et c’est lui qui a les feuilles de personnage “chiffres”, les joueurs n’ayant que du texte. C’est lui qui les a faites, et les joueurs n’ont pas un seul chiffre sous les yeux. Evidemment, il faut que le système soit simple et s’y prête, et qu’aucun joueur n’ait été MJ… Pathfinder n’est pas le plus indiqué pour cela !

Bon, c’est une expérience. Beaucoup ne sont pas prêts à aller jusque là, ni les joueurs qui aliènent une partie du contrôle qu’ils ont sur leur personnage, ni les MJ qui ont soudain l’impression de prendre sur eux le fardeau de la partie entière.

Et puis c’est une manière de contourner l’obstacle… Si vous pensez donner accès aux “chiffres” de leurs sorts aux magiciens, mais pas forcément à leur “niveau”, ni utiliser le même nom de sort à chaque fois, ni leur donner de liste précise de ce que la magie peut faire, si vous pensez simplement choisir les sorts auxquels ils ont accès (par exemple lorsqu’ils les développent, ils vous font part de ce qu’ils veulent accomplir et vous leur donnez un sort approchant à leur niveau), il faut autre chose.

Voici quelques idées pour la magie de votre monde de campagne, avec quelques pistes pour bien les développer :

La magie vient d’apparaître, et il n’y a tout simplement pas d’info disponible : Les PJ découvrent comment ça marche au fur et à mesure, comme tout le monde. Posez-vous les bonnes questions… D’où vient la magie ? Quelles sont les conséquences sociales, politiques et techniques qui en résultent ? Qui enquête sur le phénomène et comment ? Comment les PJ s’y sont trouvés mêlés ? A quelle vitesse avancent les connaissances sur la magie dans le monde ?

Incidemment, ça marche aussi pour tout phénomène du même genre, notamment l’apparition de superpouvoirs dans un monde autrement “normal”. Vous allez aussi devoir vous poser la question suivante : Une fois que vos joueurs auront compris les bases de votre système de magie, au moins à peu près (probablement après des expériences systématiques, d’ailleurs), comment allez-vous faire pour préserver le mystère ? Nouveaux sorts ? Autres types de magie ou de pouvoirs ?

La magie est ancienne, mais toute information claire sur celle-ci a disparu. Dans ce cas, que s’est-il passé ? Est-ce que c’est récent ? Est-ce que les magiciens se sont “autodétruits” dans un “grand cataclysme”, ou est-ce qu’ils ont été “purgés” par des fanatiques religieux ? Autre chose ? Comment cet art perdu est-il considéré aujourd’hui ? Est-il encore révéré, craint, ou méprisé comme impie ? Que reste-t-il des anciennes traditions ? Des objets ? Des livres que peu de gens savent déchiffrer ?

Quand et comment quelqu’un a pu retrouver suffisamment de choses sur la magie pour “redémarrer la machine” ? L’un de mes amis a conçu un monde de campagne, et même un jeu entier, sur l’idée que les anciens sorciers pour qui la magie était innée ont tous disparus, et qu’il ne reste que les magiciens qui font de la magie “à la dure”, grâce à des rituels, incapables d’utiliser les objets magiques anciens, et devant repartir presque de zéro, la magie “innée” n’ayant que rarement été codifiée…

La magie est purement intuitive. Même si elle est limitée à certains types de talents ou de pouvoirs, elle n’est pas systématique ni développée par l’étude. Apparaît-elle uniquement chez ceux qui s’y attendent le moins ? Chacun a-t-il un pouvoir différent, comme dans Lanfeust ? Les gens dotés de pouvoirs peuvent-ils progresser dans la maîtrise de ceux-ci, ou dans le degré de puissance qu’ils peuvent déployer ? Est-ce qu’il ya quelque chose de commun à tous les pouvoirs ?

Il y a moins de problèmes de règles avec cette option, mais vous devrez tout de même donner à vos joueurs une idée de ce qu’ils peuvent faire, de ce qui est possible en pratique… Jetez aussi aux orties toutes vos idées d’anciens secrets, de grimoires mystiques, d’ordres de magie, et probablement aussi d’entraînement spécial : La magie est réservée à ceux qui ont le talent, c’est gratuit et instantané pour eux et inaccessible aux autres. C’est injuste, mais c’est comme ça.

Il est impossible aux lanceurs de sorts de transmettre un savoir magique. Peut-être que la magie dépend d’un pacte avec un certain nombre d’esprits, de manitous ou de “daïmons” uniques et spécifiques à chaque personne. Peut-être que chaque “talent” est unique, comme dans la situation décrite précédemment. Peut-être que les témoins non doués du “talent” ne peuvent pas transmettre quoi que ce soit d’intéressant…

Il est possible que chaque mage ait sa vision de la magie, obligeant, comme dans D&D et Pathfinder, au déchiffrage de grimoire… Peut-être les magiciens sont-ils extrêmement paranoïaques à cause d’une ancienne guerre, ou que le savoir magique n’est pas encore systématisé, qu’ils est fragmentaire… Peut-être que l’éveil du potentiel magique dépend simplement d’une initiation mystique, mais que chacun doit ensuite suivre sa propre voie, par la méditation ou la prière…

La magie est si subtile qu’elle est impossible à différencier de la chance ou de la coïncidence. Dans ce cas, le danger est qu’elle soit si inutile que, du coup, elle n’intéresse personne ! Admettez l’existence de “points de chance” dans le jeu, et puis c’est tout. Donnez quelques utilisations “méta-jeu” à ces points, comme les “Drama Points” de l’Unisystem, les points de Fortune ou de Destin de Warhammer, les “Action Points” optionnels de D&D, et ainsi de suite.

Est-ce que le monde est au courant que ça existe ? Est-ce que les PJ sont parmi les seuls à avoir ce genre de talent ? Quelle conséquence cela a-t-il sur le monde ? D’où provient ce genre de pouvoir ? Vous pouvez bien sûr dire que ce n’est que de la chance… Ou vous pouvez dire que les PJ ont conscience d’être favorisés par le destin, et baser votre campagne là-dessus. Ce n’est pas spécialement mystérieux du point de vue du joueur, mais du point de vue du personnage, oui.

La magie est bloquée, au moins le plus souvent. Peut-être que les dieux sont contre, ou que quelqu’un a trouvé moyen de la limiter ou de la contrer, un matériau qui l’absorbe… Pour quelle raison ? Est-elle dangereuse ? Est-ce qu’elle fait appel à des créatures d’outre-plan ou risque de les invoquer ? Est-ce qu’elle pervertit l’utilisateur ? Est-ce qu’elle est aléatoire ? La “limitation” est-elle récente ? Est-elle justifiée ? Comment les gens considèrent-ils les magiciens ?

Est-ce que la magie fonctionne “mieux” dans certaines zones ? Et-ce que certains la pratiquent en secret ? Si la magie est trop faible pour réellement servir, ne vous embêtez carrément pas avec en jeu… En revanche, si vous aimez l’idée que la magie soit limitée et les mages persécutés, je ne saurais que trop vous conseiller l’univers de Midnight, jadis un monde de campagne complet pour D&D 3.5, à présent (hélas) adapté pour la 4e édition de D&D.

La magie est incroyablement dangereuse. La magie fait peur, à juste titre. Il peut s’agir d’effets secondaires sur l’utilisateur, ou sur son entourage… Ou les deux. L’approche de l’Appel de Cthulhu est intéressante : la magie va à l’encontre de la représentation du monde qu’est capable de gérer l’esprit humain, elle fait appel à des principes dont la connaissance même rend fou. L’approche de l’univers de Warhammer est à peine plus douce : des effets secondaires dévastateurs en cas d’échec.

Dans le jeu Conan (qui marche aussi avec le système d20), les magiciens sont hantés par une obsession, et pactisent avec des entités horribles, seul moyen d’obtenir leurs pouvoirs… Du coup, peu de magiciens “professionnels” sont réellement sains d’esprit. Dans de tels mondes, la plupart des joueurs ne se lanceront pas dans la magie. Mais vous aurez tout loisir de la rendre très puissante, parce que, vu les risques encourus, les PJ y auront recours le plus rarement possible !

La magie est incroyablement rare. Elle émerge au hasard, et quelqu’un doué de magie peut ne rencontrer personne d’autre comme lui de toute sa vie. De ce fait, réunir des informations sur le phénomène est une gageure, au mieux… Dans un tel monde, il vaut mieux que l’usage de magie soit intuitif et ne nécessite pas grande étude (du moins pas pour avoir des effets déjà notables), sans quoi il serait irréaliste que qui que ce soit puisse utiliser la magie.

Il vous faudra aussi trouver une excellente justification au fait que, si vous permettez aux joueurs de créer des PJ avec “le don”, le groupe comprenne le nombre de magiciens que devrait posséder le continent entier… Ou alors interdisez la magie aux joueurs, ce qui renvoie ce phénomène au stade “outil pour faire avancer l’histoire”, peut-être même sans vraies règles. Présentez alors votre jeu comme “sans magie”, du coup, c’est moins frustrant pour certains joueurs…

La magie est uniquement l’objet de rituels symboliques et mystiques. Inutilisable “à la volée” ou en combat, la magie n’influe pas sur la vie de tous les jours. Les rituels sont rares, presque toujours de grande envergure (cérémonies avec des centaines de participants et des sacrifices humains…), et leurs effets se prolongent souvent dans le temps. Même pour un “magicien”, la magie ne fait donc pas partie du quotidien.

Si par hasard les PJ (ou les PNJ) ont des connaissances occultes, ils devront être compétents dans d’autres domaines, sans quoi ils n’auront pas grand chose à faire… Mais cette vision des choses est tout à fait jouable : Puisque les PJ ne comptent pas sur une magie “systématique”, vous avez tout le loisir de rendre chaque rituel unique, ayant ses propres règles, difficile, erratique, fragmentaire et mystérieux, sans déstabiliser votre univers de jeu, et surtout sans tout expliquer aux joueurs…

Evidemment, il y a des inconvénients à chacune de ces différentes pistes.

Que la magie soit faible ou qu’il existe peu d’informations sur celle-ci, beaucoup de joueurs ne voudront pas l’utiliser. Ne vous attendez pas à ce qu’un PJ passe du temps et dépense des points pour étudier la magie si la magie n’est pas suffisamment utile pour être “rentable”, ni suffisamment stable pour qu’on puisse compter sur ses effets dans une situation dangereuse… Mais, pour préserver le mystère, il ne faut pas non plus que la magie, appliquée systématiquement, permette de dominer le monde.

C’est un équilibre délicat, d’autant que si vous rendez la magie faible à “bas niveau” et que vous la laissez dominer le jeu à haut niveau, lorsque le magicien est “expert” dans son domaine, vous prenez le risque que ledit magicien se sente inutile à certains moments… Et que les autres joueurs se sentent inutiles à la fin. Les premières éditions de Donjons et Dragons (jusqu’à AD&D) suivaient une telle courbe de puissance, même si c’était parfois pour des raisons différentes.

Dans tous les cas, si la magie est “mystérieuse” et doit le rester, la “rejouabilité” du magicien est rarement bonne, au contraire de tout autre personnage… Une fois qu’un joueur a compris de quoi il retourne, qu’il ait joué un mage ou qu’il l’ait vu jouer, il n’y a plus de surprise, et beaucoup ne peuvent pas s’empêcher de tirer avantage des règles qu’ils connaissent à présent mais que leur personnage est supposé ignorer.

Profitez alors du fait qu’il existe peut-être plusieurs systèmes ou “voies” magiques, ou que la magie est intuitive et différente pour chacun… Modifiez les effets possibles (mages du feu, ou pouvoirs psychiques…), les conditions (époque avec une grande tradition magique ou au contraire ignorante, lieux de pouvoir…), les rituels nécessaires (traditions différentes, pouvoirs différents accordés par d’autres entités), les compétences nécessaires (“savoir hermétique” au lieu de “méditation”…).

La rejouabilité peut encore être augmentée par la variété des classes de lanceurs de sorts, des listes de sorts, ou tout simplement par un système de magie “libre” comme les mots de pouvoirs (pour Pathfinder ou d’autres jeux). Aujourd’hui, les listes de sorts de Pathfinder sont si variées, de même que les archétypes et les spécialisations disponibles pour chacune des nombreuses classe de lanceur de sorts, qu’il est possible de ne pas faire deux mages identiques dans la même campagne !

Il faut aussi redire que la magie très cérémonielle (particulièrement si elle est risquée ou qu’elle a un prix exorbitant, comme des sacrifices…) a l’immense avantage de ne jamais déséquilibrer le jeu, même à grande puissance… Elle ne requiert pas un gros investissement de la part des joueurs en termes de points et de temps (ce n’est pas une “carrière”), et ce n’est pas la méthode principale qu’auront les PJ de résoudre les problèmes.

Vous pouvez même dire que chaque rite ne peut être utilisé qu’une fois par “conjonction astrale”… L’inconvénient des sorts uniques et sans règles est que, si la magie reste incompréhensible, elle est quelque chose sur lequel les joueurs n’ont que peu de contrôle… De tels rituels deviennent des MacGuffins, utilisés pour résoudre un scénario comme un Deus Ex Machina (TGCM, et pour cause…), et les joueurs se sentent des accessoires dans la cérémonie, comme la dague, la robe ou le pentacle !

C’est l’inconvénient majeur de toute magie mystérieuse dont les règles “sont trop complexes pour qu’on les codifie” (autrement dit, dont les règles sont absentes…). Même lorsqu’il y a des règles mais que le joueur n’y a pas accès, vous réduisez les options des joueurs, et vous choisissez pour eux. C’est dangereux, et ce n’est pas ce que certains joueurs recherchent… Avant tout, connaissez vos joueurs, et évitez qu’ils se sentent floués ou menés à la baguette.

Voyez-vous, du point de vue “jeu”, une magie trop mystérieuse empêche tout choix. C’est le problème du “dilemme des potions” lors de la création de personnage dans les anciens jeux vidéo Ultima (avis aux amateurs et aux plus de trente ans)… Si vous ne savez pas ce que vous choisissez, ni par rapport à quoi, est-ce que votre choix a encore un sens ? Si le magicien ne sait pas dans quoi il se lance, il ne se lancera pas, voilà tout.

De la même manière, si la magie est trop aléatoire ou chaotique, vous prenez le risque que le PJ qui en fait sa carrière (ou qui, au moins, possède ce talent) ne l’utilise jamais, ou se rabatte dessus lorsque le groupe est à court d’idées et qu’ils ne voient pas d’autre solution que de provoquer quelque chose d’inattendu ou de miraculeux en espérant que ça fasse avancer le schmilblick… Un signe au MJ qu’ils réclament un Deus Ex Machina, un indice, ou une perche pour les sortir du marécage.

Dans tous les cas, il n’y a pas de système parfait, il n’y a que des systèmes qui correspondent au mieux à votre univers de campagne, à votre style de jeu, à votre groupe de joueurs.

La magie sans aucun mystère, systématique et même scientifique, a aussi ses avantages narratifs… Je l’utilise en tant que telle dans mon propre monde de campagne, et elle fait partie intégrante du monde d’Eberron (où elle remplace la science) autant que des Royaumes Oubliés (où elle est un domaine d’étude admis et répandu, étudié selon diverses traditions de par le monde, avec ses dieux et déesses, ses aléas, ses catastrophes parfois…).

Si vous voulez d’une magie incroyable, mystérieuse, voilée, merveilleuse, il vous faut utiliser, changer ou concevoir entièrement votre système de jeu en ce sens… De même que votre univers de campagne. c’est un gros travail, mais c’est très plaisant à faire pour ceux qui aiment créer des univers. De toutes les manières, si vous faites les choses à moitié ou que vous ne faites que bricoler, vous risquez de vous retrouver avec quelque chose d’incohérent…

Et ça, c’est le pire qui puisse arriver à une campagne.

  1. La magie des Pactes - Ludilogie | Ludilogie - pingback on December 20, 2012 at 22:19

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